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Le processus d’intégration économique européenne

Intervention de Jean-Claude Trichet, Président de la BCEDialogue européende la Fondation Jean Monnet pour l’Europe 2007 Lausanne, le 21 septembre 2007

1. Introduction [1]

C’est avec grand plaisir que je participe aujourd’hui au Dialogue européen de la Fondation Jean Monnet pour l’Europe. Nous vivons actuellement une période de grands défis et d’évolutions historiques exceptionnelles. L’élargissement de l’Union européenne, désormais forte de 27 pays et de 494 millions d’habitants avec la récente adhésion de la Roumanie et de la Bulgarie, est une entreprise à nulle autre pareille. Évolution historique unique elle aussi, la zone euro comprend désormais treize pays et nous serons quinze dans trois mois avec l’entrée future de Chypre et de Malte.

L’intégration économique des pays de l’Union européenne s’est renforcée, chacun a pu le constater. Ce mouvement doit se poursuivre et s’amplifier. Dans le même temps, la création de la zone euro, à l’instar de l’élargissement de l’Union européenne et de la mondialisation, souligne la nécessité de rendre nos économies plus flexibles. En ce sens, les responsabilités de l’ensemble des responsables de la politique économique et des partenaires sociaux se sont accrues. Ceux-ci doivent, à travers une saine gestion, assurer le bon fonctionnement de l’Union européenne, caractérisé par la flexibilité, l’intégration des marchés du travail, des produits et des capitaux, et la discipline budgétaire.

J’en viens à présent au thème que j’aimerais aborder aujourd’hui, à savoir le processus d’intégration économique européenne. Dans un premier temps, je voudrais vous présenter quelques-unes des principales caractéristiques du processus d’intégration économique au sein de l’Union européenne et de la zone euro. Ensuite, je décrirai les processus d’ajustement économique, en particulier dans la zone euro. Et je dirai quelques mots, pour terminer, sur la place de l’Europe dans le monde.

2. Caractéristiques de l’intégration économique dans l’Union européenne

Permettez-moi donc tout d’abord d’évoquer brièvement quatre caractéristiques fondamentales du processus d’intégration économique dans l’Union européenne, et dans la zone euro en particulier.

a) Premièrement, l’intégration économique s’est traduite par une augmentation sensible des échanges de biens et services à l’intérieur de la zone euro. Quelques chiffres illustrent ce phénomène : les exportations et importations de biens dans la zone euro sont passées d’environ 26 % du produit intérieur brut en 1998, l’année précédant l’adoption de la monnaie unique, à quelque 32 % en 2006. Quant aux exportations et importations de services à l’intérieur de la zone euro, elles s’élevaient à près de 7 % du PIB en 2006, contre environ 5 % en 1998. Et l’approfondissement continu du marché unique favorisera davantage encore les échanges de services. À mesure que cette interdépendance se renforce au sein de la zone euro, celle-ci devient également une économie plus ouverte enregistrant une hausse des échanges avec le reste du monde. Les exportations et importations de biens hors zone euro sont ainsi passées, entre 1998 et 2006, d’environ 24 % du PIB à quelque 33 %. Sur la même période, les exportations et importations de services hors zone euro ont progressé de quelque 8 % du PIB à près de 10 %. Ces évolutions montrent clairement que nous n’assistons pas à la création d’une « forteresse Europe ». Bien au contraire, l’intégration européenne accompagne l’intégration en cours au niveau mondial.

b) Deuxième caractéristique du processus d’intégration économique européenne, l’introduction de l’euro contribue à l’intégration financière qui, à son tour, facilite la libre circulation des capitaux dans la zone euro. L’intégration financière accroît l’efficacité des mécanismes économiques, renforce la concurrence et crée un environnement propice à une croissance économique plus forte. Une étude récente menée par le London Economics a par exemple évalué les avantages de l’intégration des marchés obligataires et des actions de l’Union européenne à environ 1 point de croissance du PIB supplémentaire sur une période de dix ans, soit quelque 100 milliards d’euros [2]. Cette intégration financière est par ailleurs essentielle dans la mesure où elle favorise la transmission harmonieuse et efficace de la politique monétaire unique dans l’ensemble de la zone euro. Si des progrès ont été réalisés en la matière, la nécessité d’une intégration financière renforcée s’impose particulièrement dans plusieurs domaines, et notamment dans le secteur de la banque de détail.

c) La mobilité de la main-d’œuvre est la troisième caractéristique que j’aimerais évoquer. Le manque d’ouverture observé dans certains pays augmente les risques de pressions sur les salaires lorsque les tensions s’accroissent sur les marchés du travail. Les données disponibles donnent à penser que, dans l’ensemble, la mobilité transfrontière de la main-d’œuvre reste faible dans l’Union européenne. De plus, à l’inverse des États-Unis, on trouve encore des obstacles réglementaires dans toute l’Union européenne y compris dans la zone euro, s’agissant de la main-d’œuvre provenant de Slovénie.

d) Quatrième et dernier point, le degré de synchronisation ou l’évolution parallèle des situations conjoncturelles entre les pays de la zone euro se sont accentués depuis le début des années 1990. Autrement dit, un grand nombre d’économies de la zone euro présentent désormais des cycles d’activité similaires. En outre, les différences constatées actuellement entre les pays de la zone euro en termes d’inflation et de croissance du PIB sont plus ténues que par le passé. Ces écarts sont d’ailleurs proches de ceux qui peuvent être observés entre les différents États ou les régions des États-Unis.

La réduction des écarts d’inflation a été spectaculaire. Au début des années 1990, la dispersion des taux d’inflation à l’échelle de la zone euro était en moyenne d’environ six points de pourcentage en termes d’écart type non pondéré. L’année dernière, la dispersion de l’inflation était revenue à seulement 0,7 point de pourcentage. S’agissant des taux de croissance du PIB en volume dans les pays de la zone euro, la dispersion, en termes d’écart type, a fluctué autour de deux points de pourcentage au cours des dernières décennies, sans afficher de tendances claires à la hausse ou à la baisse.

Si certains écarts sont temporaires, d’autres sont en revanche plus persistants. À ce titre, il convient de noter que l’existence d’écarts durables en matière de croissance économique ou d’inflation entre certains pays de la zone euro est tout à fait normale dans une union monétaire, dans la mesure où ils sont liés à un phénomène de rattrapage. Mais il est tout aussi vrai que les écarts persistants traduisant des rigidités structurelles sont préoccupants. Je reviendrai sur cette question un peu plus tard.

En résumé, on constate que l’intégration économique s’accroît entre les pays de l’Union européenne. L’adoption de l’euro a grandement contribué à cette évolution en permettant une réduction des coûts d’information, une plus grande transparence des prix et la suppression des risques de change entre les pays participants. L’euro a agi comme un catalyseur pour le Marché unique, au sein duquel les biens, les services, les personnes et les capitaux circulent librement. Il reste néanmoins beaucoup à faire, par exemple pour intensifier les échanges de services et accroître la mobilité de la main-d’œuvre, ou pour alléger les rigidités structurelles.

3. Processus d’intégration économique et d’ajustement dans la zone euro

Je souhaiterais à présent aborder la question des processus d’ajustement, dont le bon fonctionnement est primordial pour tous les pays de l’Union européenne, et en particulier pour la zone euro. Pourquoi un mécanisme d’ajustement efficace est-il extrêmement important pour la zone euro ? Dans une union monétaire, tout recours à une politique monétaire ou de change nationale est désormais écarté, et il importe donc de veiller au bon fonctionnement d’autres mécanismes d’ajustement aux chocs. L’objectif consiste à éviter qu’un pays ou une région, par exemple à la suite d’un événement particulier ou d’un choc asymétrique, n’entre dans une période prolongée de faible croissance et de hausse du chômage ou dans une phase de surchauffe persistante.

De nombreux facteurs peuvent contribuer à renforcer la capacité de résistance des économies de la zone euro aux chocs défavorables. Mais avant de traiter cette question, permettez-moi de souligner que la politique monétaire unique de la BCE participe au bon fonctionnement des mécanismes d’ajustement à l’échelle de la zone euro en assurant la stabilité des prix, c’est-à-dire en ancrant la stabilité des prix dans les décisions des agents économiques. Le rôle joué dans ce domaine par la BCE est, je crois, essentiel. En d’autres termes, lorsque les partenaires sociaux conviennent d’augmentations de salaires ou quand les autorités nationales préparent leur budget ou élaborent des politiques dans leurs domaines de compétence, ils devraient être assurés, et de fait sont assurés, que la BCE et l’Eurosystème garantiront la stabilité des prix.

Des réformes structurelles adéquates renforçant la concurrence et favorisant la flexibilité des marchés de produits et du travail contribuent également dans une large mesure au bon fonctionnement de la zone euro.

À cet égard, la stratégie de Lisbonne est une démarche fondamentale et ambitieuse visant à sensibiliser l’Europe au besoin urgent de réformes structurelles. De telles réformes amélioreront les perspectives de croissance à long terme. En effet, elles ont une influence positive sur les taux de participation au marché du travail et accentuent la croissance de la productivité à travers la promotion de l’innovation et du progrès technologique. Les bienfaits d’un certain nombre de réformes structurelles ont déjà été perceptibles ces dernières années, avec la création de quelque 13 millions de nouveaux emplois depuis 1999.

La suppression des obstacles institutionnels à la flexibilité des mécanismes de formation des prix et des salaires est de nature à favoriser la flexibilité économique. Dans une union monétaire, en particulier, l’ajustement relève pour une large part des marchés du travail nationaux. La formation des salaires doit donc tenir compte des spécificités des secteurs et des entreprises ainsi que de la situation générale des différents marchés du travail. Les partenaires sociaux partagent, je tiens à le préciser, la responsabilité de veiller à ce que la nécessité de réduire le chômage et d’améliorer l’accès au marché du travail et l’emploi soit pleinement prise en compte dans les accords salariaux. En outre, les gouvernements doivent également être conscients de l’influence sur le secteur privé que peut exercer la politique salariale conduite dans la fonction publique. Et les partenaires sociaux doivent quant à eux tenir compte des conditions spécifiques des entreprises ou des secteurs d’activité, en intégrant les répercussions des accords salariaux sur la compétitivité, et donc sur l’emploi, tant au sein de leur entreprise que de leur secteur, leur branche ou leur région. Une différentiation salariale suffisante multiplierait les possibilités d’emploi pour les travailleurs les moins qualifiés et dans les régions ou secteurs où le chômage est élevé. De ce point de vue, il est clair que l’excès de réglementations relatives à la fixation des salaires compromet la création d’emplois, en particulier pour les jeunes travailleurs et la main-d’œuvre la moins qualifiée ainsi que pour tous ceux qui rencontrent des difficultés pour entrer sur le marché du travail.

Pour que les mécanismes d’ajustement à travers les marchés du travail opèrent de façon adéquate, il est également indispensable de mener à bien l’achèvement du Marché unique. L’ensemble des obstacles à la mobilité du travail au sein de l’Union européenne, et notamment dans la zone euro, doivent, en particulier, être levés.

En ce qui concerne les marchés de produits, il est là encore capital d’approfondir le Marché unique, particulièrement dans le secteur des services et les industries de réseau. Une concurrence transfrontalière renforcée et une plus grande intégration des marchés entre tous les pays de l’Union européenne contribueraient à une baisse des prix et à une hausse des salaires réels. Une telle évolution accroîtrait également la flexibilité des prix et, partant, favoriserait les mécanismes d’ajustement au sein des différents pays.

Des marchés de capitaux bien intégrés et des possibilités nombreuses de diversification des portefeuilles d’actifs financiers constituent un autre mécanisme de marché important pouvant participer à l’atténuation de l’incidence des chocs dans un pays ou une région. Lorsque ces éléments sont en place, les décisions d’épargne et de consommation des ménages dépendent moins des évolutions économiques et financières dans leur pays ou leur région. Ce mécanisme est connu sous le nom de « canaux du crédit et du partage du risque ». Cela signifie, essentiellement, que la consommation dépend moins des variations de la production nationale. Les consommateurs peuvent en effet emprunter à des institutions financières internationales et ayant une activité à l’échelle de la zone euro. Et, par ailleurs, le patrimoine financier des ménages dépend moins des conditions locales grâce à des arbitrages de portefeuille diversifiés à l’échelle internationale. En outre, des marchés de capitaux davantage intégrés favorisent une concurrence accrue, qui se traduit par des conditions de financement plus favorables pour les consommateurs et les entreprises. En quelques chiffres, aux États-Unis, entre 1963 et 1990, les marchés de capitaux ont amorti 39 % des chocs affectant le produit brut au niveau des États, soit l’équivalent du PIB, contre 23 % pour le canal du crédit et 13 % pour le gouvernement fédéral, à travers le canal budgétaire. Environ 25 % des chocs n’ont pas été absorbés. Il apparaît donc que les marchés de capitaux et les institutions financières contribuèrent à hauteur de 62 % à l’absorption des chocs spécifiques aux États. L’exemple américain montre que le canal financier peut être bien plus important que le canal budgétaire. Voilà bien un argument supplémentaire en faveur de l’accélération de l’intégration financière en Europe [3]. Une étude plus récente a révélé que la situation de la zone euro évoluait dans le sens d’une intégration plus poussée, même si cette évolution est encore modeste. Dans ce qui constitue désormais la zone euro (hors Luxembourg), les marchés financiers ont absorbé environ 10 % des chocs spécifiques aux différents pays ayant affecté le PIB entre 1993 et 2000 [4].

Les pouvoirs publics nationaux peuvent également apporter une contribution substantielle au bon fonctionnement des mécanismes d’ajustement au sein de l’Union européenne en conduisant des politiques budgétaires adéquates. Les politiques budgétaires contribuent de manière optimale au bon fonctionnement de la zone euro lorsqu’elles sont rigoureuses et axées sur le moyen terme, en parfaite conformité avec les orientations du pacte de stabilité et de croissance. De plus, l’amélioration de la qualité des finances publiques est susceptible de renforcer le climat des affaires et les perspectives de croissance tout en permettant une diminution des dépenses publiques globales au niveau national. Les données disponibles signalent en effet l’existence de sérieuses inefficiences dans les dépenses publiques des pays de l’Union européenne comme des pays de l’OCDE. En d’autres termes, il semble possible de réduire substantiellement les dépenses publiques sans affecter le volume de la production. En outre, des administrations publiques plus efficaces permettraient également une diminution des coûts indirects de l’inefficacité du secteur public, liés à un financement reposant sur une fiscalité inappropriée.

Enfin, je voudrais aborder l’importante question de la compétitivité, dont les variations constituent l’un des mécanismes d’ajustement de marché les plus importants dans une union monétaire. Dans la zone euro, les pertes durables de compétitivité relative en termes de coûts se traduisent nécessairement dans le moyen terme par un épisode de croissance moindre que la moyenne et par un chômage à un niveau anormal. Des chiffres récents ont montré que l’écart en termes de progression cumulée des coûts unitaires du travail entre les pays de la zone euro où la hausse des coûts a été la plus forte et ceux où elle a été la plus faible a été comprise entre 20 et 25 % au cours de la période 1998-2006.

En résumé, les réformes structurelles sur les marchés du travail, des produits et des capitaux ainsi que des politiques budgétaires saines sont essentielles au bon fonctionnement des processus d’ajustement au sein de l’Union européenne et particulièrement dans la zone euro. Il convient, dans le même temps, de surveiller attentivement les écarts en matière de compétitivité-prix et de coûts unitaires du travail dans la zone euro, étant donné qu’ils peuvent entraîner des ajustements majeurs dans les pays concernés au cours des prochaines années.

4. L’Europe dans le contexte mondial

L’intégration économique et des processus d’ajustement harmonieux sont clairement des conditions préalables indispensables au fonctionnement efficace de l’Union européenne. Cela est d’autant plus vrai que l’Europe est très régulièrement confrontée à des évolutions ou des chocs de nature diverse, par exemple dans le cadre de la mondialisation, qui se traduit en particulier par une interdépendance croissante de nos économies sous l’effet d’une augmentation des échanges transfrontaliers de biens, de main-d’œuvre et de capitaux. Permettez-moi de dire quelques mots à ce propos.

La mondialisation entraîne des transformations majeures partout dans le monde, pas seulement en Europe. Elle exerce par exemple des effets indéniables sur la dynamique de l’inflation.

La théorie économique a identifié plusieurs canaux par lesquels la mondialisation peut influencer le niveau des prix. Il ne fait ainsi aucun doute que la mondialisation et l’augmentation qui en a découlé des échanges commerciaux internationaux ont contribué à la modération des prix à l’importation [5], notamment dans le secteur manufacturier. Cette évolution a essentiellement résulté d’un accroissement des importations en provenance des pays à bas coûts. Par ailleurs, l’important mouvement d’ouverture des pays émergents et de presque toutes les anciennes économies à planification centralisée a entraîné une forte hausse de la main-d’œuvre disponible, ce qui a induit des pressions à la baisse sur les coûts du travail, particulièrement le travail peu qualifié. Les pressions à la modération de l’inflation provenant de la mondialisation peuvent également s’exercer de façon plus indirecte, dans la mesure où la concurrence internationale accrue a sans doute limité le pouvoir en matière de fixation des prix des entreprises domestiques. Toutefois, dans le même temps, l’émergence soudaine d’économies en forte croissance au sein de l’économie mondiale est un facteur de tensions à la hausse sur les prix de l’énergie et des matières premières [6].

En dépit des nombreux travaux de recherche menés en particulier dans les universités, les banques centrales et les différentes institutions internationales, l’incertitude reste grande quant à l’importance du rôle et à l’ampleur de l’incidence de la mondialisation. Même si l’incidence nette de ces forces agissant en sens contraire est généralement considérée comme ayant contribué à réduire l’inflation, la question de savoir si cet effet désinflationniste va durer à l’avenir, et pour combien de temps, demeure.

En dernière analyse, la mondialisation est une chance, et non une menace. La mondialisation est porteuse de solutions dont nous avons grandement besoin. Elle pourra ainsi favoriser des afflux accrus de main-d’œuvre dans la zone euro, ce qui, dans certains secteurs, aiderait à réduire les goulets d’étranglement sur les marchés du travail et, par là, à alléger les pressions sur les salaires. En outre, un apport de capitaux extérieurs en échange de savoir-faire peut aussi résulter de la mondialisation. De fait, la zone euro attire désormais de nombreux investissements directs étrangers (IDE). Une ventilation des engagements hors zone euro montre que les IDE en provenance de l’étranger se chiffrent à plus de 27 % du PIB de la zone euro, contre 22,5% aux États-Unis. La zone euro a reçu, en pourcentage du PIB, un montant d’IDE équivalent à celui de la Chine, soit 27,3 % dans les deux cas, selon les statistiques du FMI. Un montant croissant d’IDE provient des pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine).

En fait, contrairement à ce que suggérerait la doctrine protectionniste, l’intégration de l’Union européenne et l’adoption de l’euro semblent permettre à l’Europe d’être mieux armée face à la mondialisation. La monnaie unique a soutenu la progression et la diversification des exportations des pays de la zone euro, comme je le mentionnais il y a quelques instants. De même, l’euro a fortement contribué au processus d’ouverture des marchés de capitaux de la zone euro. Du côté des avoirs, les encours d’actifs de la zone euro détenus à l’étranger sont passés de moins de 87 % du PIB en 1999 à plus de 124 % en 2005. En ce qui concerne les engagements, la hausse a également été très forte, puisqu’ils sont passés de 92 à 137 % du PIB. La progression a été nettement moins prononcée aux États-Unis au cours de la même période, les actifs américains passant de 80 % du PIB en 1999 à 90 % actuellement, tandis que les engagements augmentaient de 91 à 110 % du PIB. En d’autres termes, la zone euro et les États-Unis détenaient des encours d’actifs et d’engagements assez comparables en 1999, mais la zone euro a enregistré une progression plus marquée depuis le début de l’Union économique et monétaire.

Enfin, la mondialisation met en exergue le besoin de nouvelles réformes destinées à renforcer la capacité de l’Europe d’opérer les ajustements qui s’imposent en cas d’évolutions majeures de l’environnement mondial. La mise en œuvre de telles réformes devrait accroître la flexibilité et abaisser les coûts d’ajustement pour les entreprises et les travailleurs européens confrontés à la dynamique de la mondialisation. Le renforcement de la compétitivité est l’élément central devant permettre aux Européens de tirer parti de la mondialisation.

5. Conclusion

Mesdames et Messieurs, je voudrais conclure mon intervention par ces quelques mots. La création réussie de la zone euro et l’approfondissement de l’intégration économique européenne se sont opérés parallèlement à l’intégration de l’Europe au sein de l’économie mondiale. Nous ne créons en aucune manière une « forteresse Europe». Ce n’est ni notre objectif ni notre intérêt. Il est essentiel de favoriser l’approfondissement de l’intégration économique et d’accroître la flexibilité des économies européennes. Cette évolution sera aussi de nature à renforcer les processus d’ajustement en Europe. S’agissant de la politique monétaire, l’Europe peut compter sur la Banque centrale européenne et l’Eurosystème pour être fidèle à son mandat premier et ancrer solidement les anticipations d’inflation dans la zone euro. En ce qui concerne les volets de la politique économique qui ne dépendent pas de la banque centrale, j’ai relevé trois domaines essentiels. Il convient tout d’abord de garantir la discipline des politiques budgétaires, en parfaite conformité avec le pacte de stabilité et de croissance. Il faut ensuite mener des réformes structurelles dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, en vue de l’achèvement du Marché unique. Enfin, un suivi attentif des indicateurs de compétitivité relative en termes de coûts doit être assuré.

Je vous remercie de votre attention.

  1. [1] J’adresse mes remerciements à Malin Andersson pour sa contribution à ce discours, à Klaus Masuch et Hans-Joachim Klöckers pour leurs précieux commentaires et à Antonio Afonso, Katherine Brandt et Philippe Leclercq pour leur active participation.

  2. [2] London Economics, « Quantification of the macroeconomic impact of integration of EU financial markets », rapport à la Commission européenne, 2002.

  3. [3] Voir P. Asdrubali, B. Sorensen et O. Yosha, «  Channels of interstate risk sharing: United States 1963-1990 », Quarterly Journal of Economics, Vol. 111, 1996.

  4. [4] Voir S. Kalemli-Ozcan, B. Sorensen et O. Yosha, «  Asymmetric shocks and risk sharing in a monetary union: Updated evidence and policy implications for Europe », CEPR Discussion Paper n° 4463.

  5. [5] Voir encadré 13 du Bulletin mensuel de la BCE de juin 2007, intitulé « L’incidence à la baisse exercée par la mondialisation sur les prix à l’importation est-elle en train de s’atténuer ? », Bulletin mensuel, juin, encadré 13.

  6. [6] Il existe en outre d’autres facteurs, indépendants du mouvement de mondialisation, qui peuvent contribuer à expliquer le ralentissement de l’inflation à l’échelle de la planète, comme la rapidité des progrès technologiques et les réformes structurelles, qui ont tous deux participé au relèvement du potentiel de croissance des économies et donc à la stabilité des prix, à une plus grande discipline budgétaire et, enfin, à une « meilleure » politique monétaire, qui s’est traduite par une crédibilité accrue des banques centrales.

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